Faire reconnaître le traumatisme psychique, aider les personnes qui en sont victimes et former les professionnels de santé à sa compréhension et à sa prise en charge. Association à but non lucratif, sans appartenance philosophique, politique ou religieuse.
J’ai été victime d’un accident de bus. C’est comme si c’était hier.
C’était le mercredi 26 novembre 2003, je finissais les cours à douze heures. J’ai pris le bus scolaire pour rentrer chez moi mais vers 12 heures 40-45, le chauffeur est passée par une route de campagne, il avait plu, la route glissait. Une grosse voiture noire est arrivée en face, le chauffeur s’est mis sur le côté mais il a glissé. Il a tourné son volant pour reprendre la route mais nous avons percuté un petit pont dans un fossé. Je me trouvais derrière le chauffeur, cela m’a fait bizarre car je savais que nous allions tomber dans le fossé lorsque le chauffeur a percuté celui-ci. J’ai eu un trou noir. Que s’est-il réellement passé entre le moment où nous avons commencé à glisser et celui où nous nous sommes arrêté ?
Je ne sais pas, j’essais de revoir la scène tous les jours.
Quand le chauffeur a posé la question : « est-ce que tous le monde va bien ? », j’ai réellement compris que c’était un accident et je me suis mise à rire aux éclats. Des élèves pleuraient, moi j’étais heureuse, pourquoi ? Je ne sais pas.
Un bus est venu nous chercher pour rentrer, il y avait une correspondante étrangère chez moi et elle était dans le bus avec moi. J’ai tout raconté à ma mère car nous étions en retard.
Dans l’après-midi, j’étais mal, je n’arrivais pas à faire mes devoirs, j’avais mal à la tête, je suis allée me coucher et quand je me suis réveillée, j’étais toujours aussi mal. La correspondante qui était présente a expliqué que ma tête avait claqué contre les vitres et ma mère a décidé de m’emmener à l’hôpital. Ils ont décidé de me garder trois jours en observation. La première nuit je n’ai pas dormi, je faisais des cauchemars. Lorsque je suis rentrée chez moi je ne voulais plus retourner en cours à cause du bus. Ma mère m’y a emmené tous les jours. Une amie de ma mère m’a conseillé de voir un psychologue spécialisé dans les cas de stress post traumatique à Lille. J’y suis allée toutes les semaines.
A l’école, je ne travaillais plus, ne me concentrais plus et mes notes chutaient. Personne ne comprenait, on me disait que je faisais des manières ? Etait-ce vrai ?
La première fois que j’ai vu le psychologue, cela me paru étrange car tout le monde dit que les psychologues sont pour les « fous » , étais-je folle ?
La première séance m’a fais du bien car j’ai pu expliquer ce que j’ai vu, ce que j’ai ressenti. Mais lorsque j’étais chez moi ou à l’école je me renfermais, je ne parlais plus à personne, ne mangeais plus, je faisais des cauchemars toutes les nuits. En cours, je rigolais pour n’importe quoi, je chahutais. Je faisais des tentatives de suicides, on m’insultait de folle, on disait que je faisais des manières. J’aurais aimé que ce soit des manières car cela ne dure qu’un temps mais ma situation, elle, durait déjà depuis un mois et demi. Tous les jours je revoyais l’accident dans mes cauchemars, j’entendais le chauffeur crier et je me voyais en sang, morte.
Je ne supportais plus qu’on m’insulte de folle, les profs me mettais plus bas que terre.
Après les fêtes de fin d’années, j’ai voulu faire plaisir à ma mère et reprendre le bus. J’ai discuté avec mon psychologue de ce que je voulais faire et elle m’a conseillé de m’occuper l’esprit avec un livre ou un journal, je l’ai fais.
C’étais un jeudi matin, je commençais à neuf heures. Lorsque j’ai vu le bus, j’ai paniqué. J’ai pris mon courage à deux mains et je suis montée, je me suis assise le journal dans les mains le serrant très fort. J’étais crispée.
Arrivée au lycée, j’ai couru à l’infirmerie, je suis allée en cours paniquée mais avec un sentiment de fierté car j’avais réussi. Le médecin m’avais mise sous antidépresseurs, c’est grâce à cela et au soutient d’un psychologue que je suis remonté dans le bus.
Puis les mois ont passé, j’ai cessé de voir le psychologue car je me sentais bien. Mais après deux ans et demi, je remarque que j’ai arrêté mes séances trop tôt, pourquoi ?
Aujourd’hui j’ai des difficultés à passer mon permis, je me vois tomber dans le fossé comme dans l’accident, je me vois percuter les voitures. Je panique à chaque séance de conduite.
Je voudrais dire que lorsqu’on voit un psychologue, ce n’est pas parce qu’on est fou mais parce qu’on a besoin de comprendre ses peurs, d’éclaircir son chemin.
A croire que tout ce qui arrive est ma faute, je me sens coupable. Si j’étais rentrée à dix heures au lieu de douze, je n’aurais pas à vivre ce que je vis.
Dernière mise à jour le vendredi 17 août 2007